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Myriam Marc Chapitre I - Appendre à mourir Chapitre II - Errances Chapitre III - Mourir, une fois de plus Chapitre IV - Plus froid que la mort Chapitre V - Les forces souterraines Chapitre VI - Les tunnels du souvenir Chapitre VII - Tout est à commencer

Chapitre VI - Les tunnels du souvenir

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Mascarade

 

Sur mon berceau, les ombres

S’étant penchées en nombre,

Je dus dissimuler

Les ténèbres qui m’envahissaient,

Pour être ce que malgré tout j’étais :

Un enfant - ou, plutôt

Un pantin jouant

Le rôle d’un enfant,

Tentant de cacher

La peur, la honte, la culpabilité...

Le piège s'est refermé

Sur mes secrets d'enfant souillée

 

La tête contre le mur

Le genou qui la coince

Et j’appelle maman…

Mais je ne parle pas

Car derrière le filet des mots

Il y a toujours une ombre qui guette

Ton ombre sur le tableau

 

De l'enfance, je prenais

Ce que l'on me donnait :

Des bougies à souffler,

Année après année...

 

Les années tournent et tournent

Les gâteaux sont plus gros

Et, le long des années,

Respirer devient difficile

Souffler les bougies n’a pas de sens

Pour ceux qu’on assassine

 

Manger, dévorer, puis vomir

Jusqu’à ce que vienne l’avenir

Que cesse la mascarade

Les années tournent, la tête avec

Juste faire semblant d'être dans la fête

Laisser passer le temps,

C’est la seule issue maintenant

 

Et chaque année

Le souffle est plus court

Et chaque nausée

Est ravalée de force

Pour masquer la saleté

La garder à l’intérieur

 

À la tombée des masques,

Des années de distance

Entre moi et l'enfance.

 

J'ai chassé les fantômes,

Rhabillé les Barbies

Décapité la marionnette à tête-de-mort,

Celle qui souriait de toutes ses dents

 

J'ai ouvert le placard

Celui des enfants désobéissants

Qui ne veulent jamais

Mais qui doivent pourtant

 

Tout cela va si vite

Pour des années d’errance,

Pour des puits de souffrance

 

Puis l’école a brûlé

Mais l'enfance est restée,

Incandescente au fond de moi

Les cahiers au feu

Les blessures au chaud

 

Tout cela va si vite

Le repli dans l'oubli

Tout cela va trop vite

Pour ceux qu'on assassine

 

Méfiez-vous des anniversaires

De ces bougies qui vous aveuglent

Car derrière les lumières

Il y a toujours une ombre

Que vous ne verrez pas

 

L'enfance fut une mascarade

L’adolescence un jeu de massacre

Mais maintenant dans le noir

Je n’ai plus peur

D’explorer mon placard

 

Et cela prend du temps

Pour ceux qu'on assassine

Tout cela prend du temps

Toute une vie, sûrement

 

dessin : de la fatigue d'être soi
De la fatigue d'être soi.

 

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