Chapitre V - Les forces souterraines : L'amour | ||
Duramen
La banquise chancelle : Ça coule doucement, Ça bouge et par moments Ça craque Inexorablement. Permafrost en dégel Improbable et pourtant Les icebergs à vau-l’eau S’en vont à l’aventure. Le glacier immuable Lentement fond et coule ; Ce frémissement infime Est le même qu’entre nous L’ordinaire a laissé
Nous Noyau dur dont la moie ne se désagrègera pas Cette couche tendre au cœur de nous De toi à moi Un petit pas
Si loin de nos lagons Le monoï a durci La fleur de tiaré Figée dans la masse molle : Il est de ces douceurs Rivées comme on nous colle Des tanins sur la peau Pour mieux les conserver
Alors, érodée, Arrondie par les ans, Je tente d’accompagner Ce mouvement si lent, Celui de nos dormants, Imperceptiblement
Entre nous deux Tout est si flou : Qui commence où ? Et où finit Cet entrevous, Cet entre-deux Si douloureux ? Solives alanguies Dans l’entretoise de nos nuits, J’entends la charpente craquer
Le bois travaille Il est vivant Le bois parfait Solide et fort De nos accords, Inébranlable Jusqu'à la mort
Faits de ce même bois, Nous absorbons les chocs, Doucement ondulant, Nichés tout au sommet D’un amour impassible Qui, seul, Qui, lentement, Assimile le temps.
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