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vendredi 1er mai 2009

La collation des grades

Voilà presque un an que nous sommes revenus de Montréal, et il nous manquait encore notre dernier article, en guise de conclusion, et surtout l’occasion de vous faire partager nos dernières photos… Et là, sous le soleil de printemps, une lettre arrive de l’École Polytechnique de Montréal (la Poly pour les intimes)… J’ouvre, je me demande ce qu’ils me veulent, vu que j’ai déjà reçu le diplôme, le relevé de notes… Figurez-vous que je suis invité à la « collation des grades 2008 » ! Diantre ! « Collation » d’abord, je ne savais pas qu’on nommait ainsi la cérémonie tant vue dans les films américains. Vous savez, celle où tout le monde passe recevoir son diplôme et jette en l’air son chapeau ridicule… Est-ce l’opération de « coller » le grade ? Où ? Où peut-on se le coller, le diplôme ? Un détail judicieusement absent des films américains… Non… Je fais du mauvais esprit… Non, c’est plutôt qu’on se le bouffe, le diplôme : une excellente collation en ces temps de crise. Dans le courrier, on me demande de préciser ma taille pour la toge… Du coup je me jette sur Google. La panoplie complète est : la toge, la robe noire qui descend jusqu’au sol, l’épitoge, le genre d’écharpe qui se met dessus, et le mortier, le chapeau carré ridicule avec le pompon qui tombe sur le côté. Re-diantre !

Dire que je vais louper ça :

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Eh oui, parce que, forcément, je vais le louper… Il n’y avait pas de billet d’avion dans la lettre. De plus, après avoir retrouvé avec délice la douce vie estudiantine durant une année à Montréal, j’ai maintenant un métier, et la petite escapade à Montréal, mon employeur trouverait peut-être que j’abuse ! Pourtant je m’y vois déjà… Dans le majestueux Oratoire Saint Joseph (la photo), vêtu de noir, avec mon chapeau carré ridicule posé de côté (bien sûr : on doit bien picoler dans une sauterie du genre…). Ah… Vivre une scène déjà si souvent vue dans les comédies potaches… Forcément, un peu d’émotion, je me serais peut-être un peu planté en montant sur l’estrade (également vu dans des comédies), j’aurais peut-être été malhabile, j’aurais probablement eu un air très niais sur la photo officielle, et sur celles que nous aurions pu mettre dans un prochain article, dérogeant pour l’occasion à la règle que nous nous sommes fixés de ne jamais laisser apparaître nos visages sur le site. Tout cela, oui. Mais ça aurait tout de même valu le coup !


Bon, cessons de nous lamenter, de rêver à une cérémonie utopique. Nous ne sommes plus en voyage, nous sommes rentrés dans nos souliers. Que peut-on retenir de ce séjour au Québec ? Oh… plein de choses…

D’abord un ami, Yann, qui habitait en-dessous de chez nous, et, accessoirement, était notre propriétaire. Nous nous sommes revus il y a peu, en Bretagne, avec grand plaisir.

Ensuite, bien sûr, nous avons vu l’hiver québécois, c’est-à-dire six mois de l’année à marcher sur des trottoirs enneigés… Au début on trouve ça sympa, la neige : tout est blanc, cotonneux. Puis, au fur et à mesure du temps passé à se battre contre la neige, on finit par trouver ça carrément lourd…

Et puis, nous appréhendons un peu mieux ce qu’est l’Amérique, car le Québec, c’est avant tout l’Amérique. Une Amérique plus proche de l’Europe que la côte californienne, mais l’Amérique tout de même.

Et finalement, surtout, le fait de vivre pendant un an dans une autre culture permet de mettre en lumière ce qui, dans notre comportement, provient de notre culture d’origine. À ce propos, deux choses m’ont particulièrement marqué :

1 – La violence de la société française. En arrivant au Québec, nous avons été frappés par la gentillesse des Québécois, et, plus généralement, par la simplicité des rapports humains, la confiance et le respect qui régissent tous les échanges. Par exemple, au début de notre séjour, nous avons été agréablement surpris par le fait qu’on puisse entrer dans un supermarché avec un sac fermé, puis passer aux caisses sans que personne ne demande à vérifier le contenu du sac… Une fois, même, nous avons par mégarde omis de payer deux pizzas surgelées placées dans un sac isotherme que la caissière a pudiquement passé sur la caisse sans jeter un œil au contenu. Autre exemple : dans un cours de négociation, j’ai plusieurs fois constaté que les Québécois se comportaient le plus souvent avec honnêteté, alors que les étudiants français se comportaient comme des chiens. À l’inverse, en rentrant en France, j’ai été choqué par le caractère conflictuel des rapports humains. Ici, nous semblons être dans une lutte permanente les uns envers les autres, la méfiance est généralisée. Que ce soit dans les magasins, dans les administrations, au travail, on a toujours l’impression d’être a priori coupable de quelque chose. Alors que les Québécois présupposent l’honnêteté et ne changent d’attitude que sur la preuve d’une entourloupe, les Français partent du principe que tout le monde les arnaque et ne se détendent que lorsqu’ils ont la preuve de l’honnêteté de leur interlocuteur.

2 – La déshumanisation des rapports. C’est peut-être un corolaire du premier point, probablement même. Au Québec, chaque personne est avant tout une personne, ayant ses propres aspirations, ses qualités, ses défauts, son parcours… En France, j’ai l’impression que l’individu se dissout dans sa fonction. Avant d’être un être humain, le chauffeur de bus est un chauffeur : il doit se taire, ne pas faire transparaître ses humeurs. J’ai été particulièrement frappé par ce point en cherchant du travail en France. Alors que, pendant l’année à Montréal, personne ne semblait choqué que je veuille changer d’orientation professionnelle, en France, cela semble être d’une grande originalité… D’une originalité douteuse même… Alors que, objectivement, le fait de connaître plusieurs domaines, plusieurs pays, plusieurs cultures, est une richesse, il semble que, en France, cela inquiète plutôt les recruteurs : on sort du cadre, on ne se coule plus exactement dans le moule. D’ailleurs, il est symptomatique que les offres d’emploi françaises exigent le plus souvent une expérience dans l’exact domaine concerné : pour un travail donné, les entreprises recherchent quelqu’un qui l’a déjà fait. Au contraire, au Québec, les entreprises recherchent un capital humain : peu importe que l’on ait déjà fait ce travail, l’important est de montrer qu’on sera capable de le faire, même si cela demande un peu de formation…


Voilà donc pour ma conclusion personnelle à ce voyage d’un an au Québec… Au plaisir de vous retrouver pour un autre voyage !

par Fabrice

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