Après les magnificences du parc Abel Tasman, nous reprenons la route sous une pluie fine pour rejoindre Picton, d’où nous devons prendre le bateau pour l’île du Nord. Le temps est très variable, le ciel est empli de nuages blancs, le bleu profond apparaît souvent, le soleil éclate par moment. Ça donne une lumière étonnante, très blanche, très pure. Sur la route, nous passons Nelson, qui nous semble être une ville agréable. Prise entre la mer étincelante et les collines abruptes. Mais nous ne nous arrêtons pas.
Nous arrivons vers la pointe nord de l’île du Sud sous un beau soleil. Pour rejoindre Picton, nous avons le choix entre la route principale, qui fait un long détour, ou une route touristique qui coupe à travers les montagnes. Pas découragés par notre passage en centrifugeuse de la veille, nous optons pour la seconde option. Et nous ne le regretterons pas ! Autant pour les paysages magnifiques que pour les tournants en épingle à cheveux, au bord d’un précipice de cents mètres, et sans barrière de sécurité. À ce propos, une digression s’impose. En Nouvelle-Zélande, île du Sud, nous avons vu Deux fois des routes à plus de deux voies avec une rambarde au milieu : en sortant de Dunedin et en sortant de Nelson. Sinon, c’est la départementale moyenne. Enfin, moyenne… Disons plutôt la départementale de haute montagne, avec, comme je le disais, des tournants monstrueux, des routes minuscules, et une quasi absence de barrières de sécurité. Souvent, la route n’est longée que par un faible enclos, destiné à éviter que les moutons n’envahissent la chaussée (encore heureux, parce qu’avec un mouton au milieu du tournant en épingle à cheveux, je n’ose imaginer…). Et là-dessus, tout le trafic passe, y compris les 35 tonnes, les cars de touristes et les camping-cars conduits par des gens qui inaugurent leur première journée de conduite à gauche. Pourtant, étrangement, les ravins ne sont pas jonchés de carcasses de voitures, ils doivent faire disparaître les traces. Sur ces routes, la vitesse est magnanimement limitée à 100 km/h… Véridique. Vous êtes péniblement en train de sortir d’un tournant à 180°, vous venez de repasser le 2ième pour dépasser les 5 km/h, et vous tombez nez à nez avec une limitation à 100 ! Et là, effrayé, vous imaginez un bolide qui arrive en face à 100 km/h, forcément au milieu de la route, parce qu’à cette vitesse il ne pourrait pas faire autrement… Non, ce n’est pas si absurde. En fait, les néo-zélandais font une grosse différence entre la limitation de vitesse et la vitesse conseillée : les limitations ne changent pas beaucoup, mais chaque tournant est précédé d’un panneau jaune qui indique sa forme et la vitesse à laquelle il est conseillé de le prendre. En fait c’est très bien comme système !
Mais revenons au voyage. Vous pourrez contempler sur les photos jointes la beauté des paysages de fjords qui constituent la pointe nord de l’île, avec le ciel chargé et les tâches de soleil que nous y avons vu. Et encore, il est dommage qu’on ne puisse s’arrêter chaque fois qu’un point de vue nous frappe ! Depuis que nous sillonnons la Nouvelle-Zélande, nous avons pris l’habitude de ne nous arrêter que de temps en temps pour témoigner devant vos yeux ébahis de ce que nous voyons, mais nos yeux enregistrent beaucoup plus d’images que l’appareil photo !
Au terme de ce tortueux périple, nous arrivons à Picton. Le guide précise que la ville existe essentiellement grâce au trafic des ferries. Effectivement, il y a le terminal des ferries, au fond du port, puis un centre ville tout à fait honorable, avec des dizaines de bars et de restaurants, puis, dès qu’on s’écarte de quelques dizaines de mètres, on passe dans la zone industrielle : entrepôts, casses de voitures, etc. Notre motel, que la brochure décrivait comme tout proche du terminal des ferries, est en fait situé de l’autre côté de la ville, mais ce n’est pas très loin de toute façon ! Donc oui, Picton est une ville de passage… Nous la quittons le lendemain sans regret, nous la voyons disparaître derrière le voile gris de la pluie qui tombe maintenant sérieusement. Adieu Picton, au revoir l’île du Sud, nous attaquons l’île du Nord.
La traversée en bateau dure 3 heures, comme tous les trajets en transports que nous faisons depuis notre arrivée à Adélaïde : 3 heures entre Melbourne et Alice Springs, trois heures entre Alice Springs et Ayers Rocks, trois heures entre Ayers Rock et Sydney, trois heures encore entre Sydney et Christchurch… Il fait gris, il pleut, et la mer est agitée. Et je fais arrêter d’écrire, car à force de fixer l’écran qui roule et tangue devant mes yeux, je vais finir par être malade… Je me demande comment les vaches, parquées sur le pont dans un camion, se sentent actuellement… !
Un peu plus tard, nous avons roulé 400 kilomètres pour arriver au bord du lac Taupo, et nous nous sommes arrêtés dans un motel au bord de la route, sous la tempête. Un fort coup de vent apparemment, mais nous n’en savons pas plus vu que nous n’écoutons pas les informations ! Sur la route, nous avons dû contourner un arbre abattu et nous avons vu plein de véhicules de l’armée… Un moment nous avons cru que l’état d’urgence était déclaré, ou que les extraterrestres avaient effectivement débarqués sur l’île du Sud (cf. l’article précédent). Mais non, un simple exercice probablement… L’île du Nord nous semble très différente de celle du Sud : beaucoup plus de villes, beaucoup plus de centres commerciaux… Il n’y a plus d’opossums écrasés sur la route non plus (nous avons compris que le carnage des routes du sud est dû à la prolifération incontrôlée de ces charmantes bestioles, n’ont-elles pas colonisé l’île nord ?)… Et des routes beaucoup plus praticables… L’île du Sud doit être un peu comme la Bretagne des années 50 : des routes étroites, des touristes… En milieu de route, nous avons traversé un véritable désert. Nous n’avions pas une vue très étendue, à cause de la pluie, mais c’était tout de même un paysage inédit pour nous en Nouvelle-Zélande !
En tout cas, c’est assez agréable de se retrouver dans une chambre coquette, sous la tempête.