L’enfer
La mer fait face au ciel, seule la pluie les unit. Peut-être sont-ils aussi malheureux que nous de ne pouvoir se rejoindre, de ne jamais se toucher. Parfois par les matins brumeux, alors que l’on ne distingue rien au-delà de cette blancheur, les nuages descendent sur terre et vont se plonger dans l’océan ; est-ce ainsi que la mer fait l’amour au ciel, qu’elle puise son énergie aux forces de l’univers ? Quand elle gronde, quand elle s’élève puis s’abat si fort sur la rive, peut-être essaie-t-elle de crier son amour ? Elle est vaine, pourtant, la caresse incessante de la mer, car elle ne peut atteindre le ciel, et je la comprends quand elle se déchaîne sur le sable pour venir frapper les rocs de ses lames puissantes. Comme elle mon âme se fracasse contre une réalité trop rude, elle voudrait crier son amour, que son cri résonne dans l’univers pour parvenir jusqu’à toi. Mais ni le ciel, ni la terre, ne semblent vouloir entendre mon cri, alors je désespère et seuls mes pleurs apaisent ma souffrance. Le ciel doit souffrir atrocement, lui aussi. Il pleut beaucoup, ici. L’enfer, c’est la mer qui tend ses bras désespérément vers le ciel et retombe chaque fois sur elle-même, c’est la pluie qui ruisselle sur mes cheveux, qui se perd et meurt sous la terre, c’est le néant, l’infini, la voûte céleste où les étoiles se consument en une lente agonie. L’enfer, c’est ici quand tu es loin de moi, quand je ne sens plus ton souffle sur ma peau, quand mes lèvres ne rencontrent que l’air glacé, quand le soleil ne réchauffe plus nos corps enlacés. L’enfer, c’est partout où tu n’es pas.
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