À l’Université de Montréal, il y a un trimestre d’automne (début septembre à mi-décembre), un trimestre d’hiver (début janvier à mi-avril), et un trimestre d’été (début mai à mi-août). Jusque là, tout va bien. Sauf qu’il manque une saison. Vous savez, celle qui, sous nos latitudes, débute le 21 mars et se termine le 21 juin, cette saison qui, généralement, coïncide avec les premiers bourgeons, la renaissance de la nature après un long engourdissement, celle où on commence à revoir la lumière du jour, le soir, même en sortant du travail… Certes, nous sommes passés à l’heure d’été il y a deux semaines. Certes, les températures sont, la plupart du temps, positives (jusqu’à +8 !) depuis environ une semaine. Certes, les écureuils sont à nouveau de sortie, on entend à nouveau le piaillement des oiseaux, et les amoureux s’embrassent dans la rue. Tous les signes du printemps sont là. Sauf que, aujourd’hui, il neige, et qu’on n’a pas vu une touffe d’herbe verte depuis novembre. Tout est toujours blanc comme un cachet d’aspirine (ou de Tylénol, l’aspirine locale), et là, alors que les blocs et autres tas de neige entassés tout l’hiver avaient commencé à fondre et à laisser entrevoir le goudron en dessous, voilà qu’il neige de nouveau, et pas à petits flocons, hein, pas de la petite gibelotte (rien à voir avec la recette du lapin, il s’agit du nom donné ici au grésil) non, de la bonne grosse neige des familles, de celles qui collent partout et s’accrochent aux cheveux, de bons vieux flocons qui s’abattent en masse sur les routes et partout où ils peuvent, pourvu que ça se voie. Du blanc, du blanc, rien que du blanc. Bouh !
Nous avions fait un pari il y a une semaine : j’étais d’avis qu’on aurait encore une grosse tempête de neige avant le printemps, Fabrice, lui, disait que c’était bel et bien fini, que la neige allait fondre gentiment et tomber dans l’oubli. Entre temps, je m’étais fait une raison, et je n’étais finalement pas mécontente de perdre le pari, tant le besoin de couleurs et de chaleur se faisait sentir. Alors, aujourd’hui, il semblerait que je sois en passe de le gagner, mais, franchement, je n’en suis pas fière. Pour ce qui est du printemps, il paraît qu’ici il dure une semaine, 10 jours au plus : on passe de l’hiver à l’été sans avoir le temps de dire ouf ! Du moins, c’est ce que disent les Montréalais qui le sont depuis au moins 10 ans, alors on serait tenté de les croire. Maintenant, c’est à vérifier de façon empirique. Nous tiendrons donc le coup. Nous ne bougerons pas jusqu’à ce que la ville reprenne des couleurs, jusqu’à ce qu’elle quitte son manteau blanc pour des tenues plus estivales, que son visage livide se farde de nouveau de vert, de jaune, de rouge, de n’importe quelle couleur pourvu qu’elle crie, qu’elle criarde, qu’elle vive ! Allez, sur ce, je vais quand même jeter un coup d’œil par la fenêtre, des fois que le dérèglement climatique ait déréglé aussi l’absence de printemps au Québec et qu’il nous en offre un tout beau tout neuf et qu’on n’ait plus à regarder le paysage dans le blanc des yeux. Bon, ça se présente mal : Blanche Neige s’est encore répandue partout. Alors, dès qu’on a des nouvelles du printemps, on vous fait signe !
Le célèbre film "Nuits infernales à Montréal !" :