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Publication le 2008-04-07 23:39:38

Mis à jour le 2008-04-07 23:51:13

Livres

Jacques Poulin : Jimmy

7 avril 2008

Jimmy nous raconte des histoires. C’est un garçon qui vit au bord du fleuve Saint-Laurent, près de la ville de Québec. Il y vit avec son papou, sa mamie et le Chanoine (son chat). D’autres personnages gravitent autour de son chalet sur pilotis : le Commodore, Thiers, la nageuse longue distance et leurs cinq filles, dont Mary, qui a l’âge de Jimmy. Celui-ci nous parle de sa réalité, nous mène en bateau, parfois… On entre dans son univers, curieux et intimidé, et on en ressort échevelé et les pieds mouillés. Après avoir été surprise et intriguée par ce monde, je me suis volontiers laissée embarquer dans cet univers tendre et drôle où le fleuve tient une place importante et où la réalité est une chose qui se déroule à la fois en surface et dans la tête de Jimmy. Il imagine des histoires, joue avec et nous les raconte en nous les présentant comme la réalité, sauf qu’il est « le plus grand menteur de toute la ville de Québec ». Du coup, on n’est pas trop perdu, on sait ce qui existe dans la « réalité » et ce qui existe dans sa tête. Du moins on croit le savoir.

Mais il importe peu, de toutes façons, de distinguer ce qui est vrai de ce qui est inventé, tant le monde de Jimmy est doux, et ce malgré sa difficulté à communiquer avec les adultes, malgré leur manque de considération pour lui, parfois (papou coincé dans son grenier à écrire, mamie coincée dans une souffrance dont je préfère ne pas dévoiler la cause ici). Par le regard que Jimmy porte sur eux, on entrevoit le monde des adultes et ce qui se trame dans leur existence. Le fait que Jimmy doit prendre des pilules tous les jours est aussi évoqué, mais cela non plus ne revêt pas une importance capitale, ce point fait partie d’une réalité où tout reste « clair » et où rien ne « s’embrouille », mais, à choisir, je préfère les embrouilles de Jimmy à la réalité crue.

Portée par une écriture tendre et dynamique, cette incursion dans le monde de Jimmy est un baume pour tous ceux qui vivent dans le monde « réel », un plaidoyer pour un monde où l’imaginaire occupe une place de choix. Un récit savoureux, à dévorer d’une traite.

Myriam

P.-S.

Extrait : « Tu pourrais croire qu’il n’y a aucune ressemblance entre un goéland et une goélette. Je veux dire, si on te posait la question sans avertissement, comme par exemple la religieuse, à l’école, qui te pointe du doigt par-dessus tout le monde quand tu es assis paisiblement à l’arrière de la classe, tu serais obligé de te lever et d’avoir l’air fou, et tu serais porté à donner ta langue au Chanoine. Papou m’a expliqué la ressemblance, en même temps que l’histoire des goélettes. C’est très calé, une question de racine ou quelque chose, et si tu veux t’en souvenir, il faut que tu partes du fait que les pitounes* étaient des arbres et avaient des racines, et ensuite que… crotte de chat ! J’ai oublié toute l’affaire ! Mais c’était très scientifique, je le jure.  » (p. 37/38)

Poulin, Jacques : Jimmy (Éditions du Jour, 1969) réédition : Babel, 1999 – 181 p.

*Le mot « pitoune » désigne ici des rondins de bois – à ce propos : les quelques mots de vocabulaire québécois ne sont nullement un obstacle à la compréhension, la langue utilisée n’a aucun rapport avec le joual (la langue parlée argotique québécoise, parfois incompréhensible pour les Français)